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Vous n'êtes pas seul.

Le cri de l'homme adulte qui sort des ténèbres permet à l'enfant en lui de trouver la lumière.

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Retrouvez, l'enfant en vous!

L'homme et le corps

Voici quelques extraits tirés de livres de référence concernant le lien existant entre le traumatisme et le corps.

 

1. Guérir, écrit par David Servan-Schreiber, aux éditions Robert Laffont, France, 2005.
Voici des extraits du livre:

  • “Nous ressentons les émotions dans le corps, pas dans la tête (…)” (p.48)
  • “Déjà en 1890, William James, Professeur à Harvard et père de la psychologie américaine, écrivait qu’une émotion était avant tout un état du corps, et seulement ensuite une perception dans le cerveau.” (p. 49)
  • “Tout traumatisme émotionnel laisse une cicatrice dans le cerveau” (Rauch et al., 1996 ) (pp. 152-153)
  • “Le cerveau émotionnel contrôle les fonctions physiologiques du corps: le rythme cardiaque , la tension artérielle, l’appétit, le sommeil, la libido, et même le système immunitaire. C’est sur lui qu’il faut agir pour guérir le stress, l’anxiété et la dépression.” (Servan-Schreiber et al.,1998)

2. Comment aider les victimes souffrant de stress post-traumatique, écrit par Pascale Brillon, aux éditions Quebecor, Québec, 2010.

3. L’intelligence émotionnelle, écrit par Daniel Goleman, aux éditions Robert Laffont, France, 2003.

  • À partir de la page 213 et suivantes, l’auteur aborde la manière dont les émotions influent sur la santé.

4. Des yeux pour guérir, écrit par Francine Shapiro et Margot Silk Forrest, aux editions Seuil, Collection Couleur psy, France, 2005.

Le toucher

Qu’est-ce que le toucher ?

Le toucher est le sens le plus important de notre corps. Il nous donne la notion de la profondeur, de l’épaisseur et des formes. C’est par notre peau, grâce au toucher, que nous ressentons, aimons, détestons.

La peau est notre premier mode de communication, la plus efficace de nos protections. Après le cerveau, la peau est ce qu’il y a de plus important. Le sens du toucher est le plus associé à la peau, c’est le premier à se développer chez l’embryon. Il est transmis de la peau au cerveau et il constitue un système d’alerte vital. Les gens atteints de la maladie d’alagia cutanée subissent de graves blessures avant de prendre conscience du danger car cette maladie les rend insensible à la douleur sur leur peau. Selon un reportage présenté récemment à la Société Radio Canada, une dame atteinte de cette maladie s’exerçait à tenir un œuf entre ses doigts. Cette pratique quotidienne s’est prolongée sur 8 années avant qu’elle puisse le tenir sans l’échapper ni l’écraser. Pouvez-vous imaginer tous les efforts de concentration que cela a dû lui demander ! Elle perçoit des sensations uniquement au niveau du haut de son visage. Afin de ne pas se brûler avec son café, elle en vérifie la température avec son front. Un être humain peut vivre aveugle, sourd et manquer totalement de goût et d’odorat, mais il ne saurait survivre un instant sans les fonctions assurées par la peau. La stimulation permanente de la peau par l’environnement sert donc à maintenir son tonus à la fois sensoriel et moteur.

Contrairement à la vue ou l’ouïe, le toucher nous fait ressentir les choses à l’intérieur de nous-mêmes. Goûter et sentir sont des sensations limitées à la surface de la cavité nasale et au palais. Le toucher nous fait prendre conscience que notre monde se compose des présences, d’objets qui sont d’autres corps. Le toucher est le sens du corps tout entier ; par lui pénètrent en nous les impressions du dehors, par lui se révèle toute souffrance intérieure de l’organisme et tous les plaisirs qui s’y cachent. Il est très difficile de concevoir quelqu’un qui aurait été aimé tendrement et caressé dans son enfance, et qui n’aurait pas appris à approcher tendrement une femme, un homme ou un enfant. Par contre, ce qui peut faire beaucoup de mal à l’enfant plus tard est l’ignorance parentale peut être due au rejet de la mère face aux démonstrations d’amour de son fils, de peur qu’il ne reste trop attaché à elle, ou peut être due au père qui repousse lui aussi son fils parce qu’il a peur qu’il devienne homosexuel. Gifler un enfant peut servir à maintenir la discipline, mais cela peut aussi transformer la peau en source de douleur plutôt que de plaisir. On leur inflige volontairement une douleur qui les prive du bien-être que la peau signifie habituellement pour eux. Ils peuvent alors en venir à associer leur propre peau et celle des autres à la crainte du toucher et à la douleur, et fuir tous contacts par la peau dans leur vie ultérieure.

(Réf.: La peau et le toucher : un premier langage, d’Ashley Montagu, éd. Seuil, France, 1979)

 

La communication par le toucher

Chaque culture accorde une place différente à la naissance, la vie, la mort, l’importance du toucher. En Europe, la bise est de mise lorsque l’on rencontre quelqu’un et ce, à chaque rencontre tandis qu’au Québec, il existe un tabou au sujet du toucher. Aujourd’hui, une simple poignée de main est devenue rarissime même à la première rencontre. Dans la Province de Québec, le toucher a toujours eu un sens péjoratif ; il suffit de toucher quelqu’un ou même de le frôler par accident ou sans raison valable pour devoir s’excuser ; c’est l’éducation étroite que l’on a reçue et qui nous vient de l’ère victorienne. Ici, au Québec, le toucher peut même être un péché, on nous l’a assez prêché pendant nos années d’école ; le toucher était contrôlé par les lois de l’État, les lois de l’Église, on formait des esprits étroits, on croyait que c’était mieux. Pas surprenant que pendant un siècle au moins on ait pu dénombrer un nombre record de femmes séchées qui haïssaient les hommes et qui défendaient constamment leur VERTU contre les attaques tous les jours et 24 heures par jour. Même le médecin ne touche pas souvent, il pose des questions, il rédige une ordonnance, de là le cortège grandissant de gens désappointés une fois rendues dehors. L’expérience tactile est un besoin pour l’être humain à partir de l’âge de 0 jusqu’à l’âge de 150 ans. Il faut rééduquer les esprits, réapprendre que la connaissance du corps est importante et annihiler une fois pour toute ce sentiment véhiculé par tout le monde, qui veut que tout ce qui est corps est associé à quelque chose de mal ou sexuel.

Notre culture est essentiellement audiovisuelle, avec une prédominance du visuel. Le sens du toucher est laissé pour compte. Lorsqu’un voyant a les yeux bandés, il essaie automatiquement de ” voir ” avec les mains, plutôt que de ” sentir ” son environnement. Nous n’avons pas appris à percevoir avec nos mains, notre corps, notre peau toute entière. Nous ne savons pas exprimer tout notre être à travers notre contact avec l’autre, rencontrer le monde et les autres dans une relation plus proche que celle du regard qui maintient presque toujours une forme de distance. (1) Nous n’avons pas appris non plus à développer suffisamment cet organe des sens pour qu’il soit capable de ressentir des choses subtiles ou même de nous les faire percevoir à distance. Or, le sens du toucher est le premier à fonctionner in utero (dès huit semaines de grossesse) et c’est le seul organe des sens qui se trouve réparti sur l’ensemble du corps. Ce n’est probablement pas un hasard si la nature nous a fait ce cadeau-là et il est triste de ne pas l’utiliser ni le développer. Pourquoi ce potentiel, présent chez tous et qui s’exprime encore chez l’enfant, a-t-il été ainsi délaissé ? Les hypothèses envisagées ici évoluent actuellement, mais restent néanmoins d’actualité.

(1) Il s’agit d’avoir une sensation tactile de quelque chose que je ne touche pas directement. Par exemple, si quelqu’un m’envoie un ballon, je peux sentir ce ballon arriver avant qu’il ne soit dans mes mains. D’une part, la relation précoce à la mère est souvent marquée par le manque. La vie intra-utérine est peu prise en considération. Son impact sur la vie psychique de l’individu est peu abordé. In utero, les bébés reçoivent certes des touchers de tendresse pendant leur séjour dans le ventre de leur mère, mais ils sont aussi souvent confrontés à des touchers très objectivants (2), même de la part de leur parents.

Après la naissance, le bébé est sevré trop rapidement d’un contact proche et sécurisant. On déconseille aux mères de beaucoup garder le bébé dans leurs bras ou leur lit. (Pendant la Deuxième Guerre Mondiale, les médecins interdisaient aux infirmières des pouponnières de prendre les bébés dans leurs bras même pour les nourrir. Le taux de mortalité infantile était très élevé. Voyant cela les médecins ont suggéré aux infirmières de prendre les bébés pour les allaiter. En quelques mois le taux de mortalité a chuté du tiers.) La relation corporelle avec la mère se fait surtout à travers les soins, donc une relation affective, plutôt qu’une relation de plaisir, de jeux, d’échanges gratuits.

D’autre part, la relation au père est marquée par l’absence ou par une sexualisation. Sur le plan corporel, le père est rarement présent avec l’enfant avant l’âge oedipien. Or, à ce moment-là, l’enfant vit une poussée pulsionnelle qui fait que, si le contact corporel s’établit à partir de cette période, il sera d’emblée plus sexualisé au niveau du vécu de l’enfant. De plus, la relation entre le père et la fille est liée à la capacité ou l’incapacité du père à être en relation avec son épouse, mais aussi à son niveau de satisfaction ou d’insatisfaction dans cette relation. Généralement, la fille se trouve dans une relation avec son père où elle est peu touchée, mais beaucoup regardée, parfois d’un regard qui “touche”, c’est-à-dire sexualisé. Cela induit chez elle un malaise dans le contact. Parfois aussi, elle prendra la place de sa mère et aura à subir des violations de son intimité, voire même de sa sexualité. Quant au garçon, il reste “prisonnier” de la relation à sa mère dont il est souvent “le petit homme”.

En conséquence, les enfants qui ont vécu le manque à un niveau précoce – manque ne voulant pas dire absence, mais manque de présence réelle et respectueuse, manque de disponibilité, manque de contact affectif confirmant – deviennent des adultes qui ne peuvent pas vivre leur corps. Celui-ci devient essentiellement fonctionnel. Ces enfants s’adaptent à la réalité extérieure, font des compromis, deviennent pour cela infidèles à eux-mêmes et vulnérables. Ils développent des réactions de défense et de fermeture vis-à-vis du monde extérieur et fonctionnent dans une rationalité fondée sur la maîtrise de soi et la dominance du contrôle cérébral. Ils ont tendance à se placer dans des relations de pouvoir ou de dépendance, n’ont donc pas de présence à eux-mêmes et peu de contact profond avec les autres.

(2) Un toucher objectant est un toucher qui fait sentir à l’autre qu’il est considéré comme un objet plutôt que comme une personne. Par contre, l’enfant qui a vécu une confirmation affective de son existence – et le plus tôt est le mieux – se vit comme bon et aimable. Il a en lui une sécurité qui lui permet de s’affirmer en tant qu’individualité. Son identité propre et son authenticité peuvent se développer. Quand la sécurité est là, la personnalité authentique se développe automatiquement.

Une autre conséquence du manque se trouve inscrite au niveau de la mémoire corporelle de la peau et de la cellule qui enregistrent comment on a été touché et de celle de fascias (membranes qui fixent les muscles aux os) qui gardent l’empreinte des traumatismes. Cette mémoire est corporelle et émotionnelle. Les ostéopathes qui travaillent avec les bébés connaissent bien ces situations où, à partir d’une stimulation corporelle, le bébé retrouve les mouvements et les émotions de sa naissance.

Le corps enregistre des sensations qui s’y impriment et peuvent revenir avec précision. Ainsi, des souvenirs et des sensations très archaïques peuvent être stimulées par un simple toucher. Le toucher est un sens directement en contact avec l’inconscient. Il est là avant les mots. Cela veut dire que, quand nous touchons quelqu’un, nous réveillons nécessairement quelque chose de cette mémoire, même si cela ne revient pas à la conscience. Nous re-stimulons les manques, les souffrances, les douleurs, les séparations, mais aussi les tabous, les peurs sous-jacentes à l’interdit de toucher et d’être touché. Il faut savoir que tous les manques qu’on a connus, et toute la réparation qu’on veut à la fois se donner à soi-même et à l’autre, peuvent avoir tendance à empêcher la communication.

Qu’en est-il du toucher dans le monde professionnel ? L’attitude professionnelle est imprégnée de tous ces tabous, peurs et interdits. De par leurs études, les professionnels apprennent à avoir un toucher aseptique, sans affectivité, dans lequel ils sont efficaces et peu impliqués, c’est-à-dire peu présents. On rencontre très rarement dans les hôpitaux, que ce soit comme patient-e, comme professionnel-le ou comme formateur-trice, des soignants qui touchaient en étant à la fois à l’écoute d’eux-mêmes et de l’autre. Avoir une façade professionnelle rend le toucher objectivant et rationalisant. Les soignants sont plus souvent dans leur tête que dans leur corps. Les soignants ont donc appris à ne pas être présent à eux-mêmes, à s’oublier pour s’occuper de l’autre et à ne pas être présents à l’autre, à être ” neutre ” dans le contact. En psychanalyse tout particulièrement, il y a les règles techniques suivantes : la neutralité bienveillante (rester neutre avant tout) et l’interdit du toucher. Le tactile y est abandonné au profit du langage dans le but d’éviter d’influencer le patient. Le renoncement au toucher est devenu une règle, puis un interdit, voire même un tabou, c’est-à-dire quelque chose dont on ne peut parler. Certains croient que cet interdit du toucher en psychanalyse cantonne le toucher au domaine sexuel. Du coup, cela permet d’oublier tout le côté archaïque du toucher et de la communication et, ainsi, de ne pas rencontrer les terreurs et les souffrances de ces niveaux-là.

Certains professionnels tels que massothérapeutes, kinésithérapeutes, ostéopathes, orthothérapeutes, orthogérontologues, T.R.P., chiropraticiens, physiothérapeutes,… apprennent au cours de leurs formations en communication par le toucher, à devenir affectifs dans leur toucher, à être à l’écoute d’eux-mêmes et de l’autre dans le contact, à oser de vraies rencontres. Ils apprennent à différencier le toucher avec une intention du toucher dans la présence, à prendre conscience de la façon dont ils touchent et à améliorer leur qualité de présence dans le toucher.

Quand on touche quelqu’un, particulièrement quelqu’un qui souffre, le premier contact avec cette personne peut s’imprégner dans son corps et conditionner le reste de la relation (par exemple des mains froides ou pressées). Cela se passe souvent de façon totalement inconsciente pour l’un comme pour l’autre. Il faut en développer la conscience. Quand on touche quelqu’un comme un être avec son corps, son être, son psychisme, son histoire, son âme et plus seulement un corps, la respiration s’ouvre, la personne se détend. Elle se sent reconnue, en sécurité. Elle peut alors s’ouvrir et développer son propre potentiel.

À travers une suite de questionnements (dont la liste serait trop longue à énumérer) le professionnel apprend à développer une conscience de soi et de l’autre et à devenir de plus en plus clair et authentique dans son contact à l’autre. Il apprend ensuite à développer son sens du toucher. Il apprend à écouter avec ses mains plutôt qu’à voir avec ses mains. Quand il écoute avec ses mains, il cherche à entrer en contact avec l’autre, dans le respect de lui-même et de l’autre. Il apprend à être disponible à l’autre et à son écoute dans la relation, en évitant les projections et les interprétations.

La communication par le toucher, c’est aussi et surtout développer une qualité de contact, de présence, une ouverture au niveau du cœur lorsqu’on est en relation avec l’autre. C’est développer un toucher affectif, un toucher de tendresse qui dépasse le corps pour rencontrer l’être de l’autre. Ce contact de tendresse n’a rien à voir avec un toucher objectant ni avec un toucher sexualisé. Ce dernier renvoie toujours à la vulnérabilité corporelle et parfois aussi émotionnelle. La communication par le toucher, c’est un contact dans lequel on rencontre l’autre avec respect, en restant ouvert à soi-même. Le monde de l’affectivité est un monde intérieur, profond mais ouvert à la rencontre. Pour que le contact soit vrai et non superficiel, il doit venir de l’intérieur de soi.

Le toucher affectif soulage l’angoisse, sécurise, console, fait du bien. Il aide la personne à se sentir moins vulnérable, sur le plan psychologique, mais aussi sur le plan corporel. À travers le toucher affectif, il est possible de diminuer la sensation et la sensibilité à la douleur. Le professionnel peut être à la fois professionnel et se montrer affectif dans le contact. “Être affectif” ne veut pas dire “être ambigu”, cela ne veut pas dire non plus devenir familier de façon exagérée, ni chercher une relation fusionnelle avec l’autre. Au contraire, c’est être encore plus professionnel, parce que cela demande d’avoir développé suffisamment et autant sa “compétence” que sa capacité d’être en contact profond avec soi-même et en même temps, être en relation vraie avec l’autre, de façon globale et pas uniquement au niveau de son toucher, voilà ce qu’est la communication par le toucher.

En conclusion, toutes les émotions passent par le toucher. Une simple poignée de main peut déceler la personnalité, le caractère, les émotions, les sentiments d’une personne. Rien de plus désagréable qu’une poignée de main flasque ou écrasante. Tous les états d’âme passent par les mains et ce, de façon inconsciente, qu’ils soient dirigés ou non vers l’interlocuteur. Par le toucher, on peut communiquer à l’autre toute notre négativité autant que notre positivité. En étant en contact profond avec soi, le professionnel apprend à gérer ses états d’âme afin de ne pas les transmettre à son patient. Ne l’oublions pas, il est aussi humain, avec ses propres sentiments, il a aussi un vécu extérieur à sa vie professionnelle. Il se doit donc d’être à l’écoute c’est-à-dire réceptif, congruent, ouvert et empathique, prêt à apporter le support nécessaire tout en demeurant dans les limites de ses compétences ou en référant son patient à tout autre professionnel selon le cas.

Tout être humain a besoin de contact par le toucher mais pas n’importe lequel des touchers non pas un toucher froid, superficiel, aseptique, objectant, sexualisé mais plutôt de tendresse et d’affection. Il est prouvé que les personnes qui ont le plus besoin de contact tactile sont des gens qui vivent seuls, célibataires, mais surtout les personnes âgées. Souvenons-nous de notre bonne vieille grand-mère qui nous tenait les mains entre les siennes et ce sans relâche…

(Réf.: Communiquer par le toucher, formation proposée par Brigitte Dohmen, psychologue)

 

Écrit par Patricia Lise Bourque, massothérapeute